Premièrement, il faut faire litière du plus grand sophisme de l’histoire : en utilisant le mot “Dieu” plutôt que “Yahvé”, Huckabee part du point de vue implicite (judéo-chrétien) qu’il existerait un dieu unique et universel, et que l’identité de celui-ci serait Yahvé.
L’un des facteurs clés dans l’adoption du mot “Dieu” par les disciples juifs de Yeshoua Ben Yosef est la traduction de la Bible hébraïque en grec, connue sous le nom de Septante (LXX), réalisée entre -300 et -200 pour les Juifs hellénisés d’Alexandrie. Dans cette traduction, le Tétragramme YHWH (pour “Yahvé”) est systématiquement rendu par Kyrios (Κύριος, “Seigneur”) ou, plus rarement, par Theos (Θεός, “Dieu”).
La secte nazaréenne, s’inscrivant dans la continuité du judaïsme, au Ier siècle ap. J.-C., elle s’appuie largement sur la bible hébraïque en langue grecque éditée par les juifs d’Alexandrie et devient l’écriture de référence pour ses premiers disciples, majoritairement des juifs hellénophones. Les auteurs du Nouveau Testament, rédigé en grec lui aussi, utilisent naturellement “Theos” et “Kyrios” pour désigner Yahvé, la divinité tribale d’Israël, identifié comme le père biologique de Yosef Ben Yosef.
Entre 200 et 300, lorsque les textes nazaréens sont traduits en latin (Vetus Latina, puis Vulgate de Jérôme, fin IVe siècle), “Theos” devient “Deus” et “Kyrios” devient “Dominus”. La Vulgate, qui standardise le texte biblique pour la synagogue chrétienne occidentale, utilise systématiquement “Deus” pour Yahvé dans la bible hébraïque (“Ancien Testament”).
“Dieu” n’est autre que Yahvé et il n’existe pas de concept d’un dieu unique en dehors de l’abrahamisme. Toute mention de “dieu” au singulier est par définition d’origine juive.
C’est un enjeu sémantique crucial car en adoptant un nom grec générique (“Theos”) à la place du nom de la divinité hébraïque à laquelle il se réfère (“Yahvé”), la secte nazaréenne camoufle sous un vernis d’universalité — ou disons d’hellenité — ce qui est une divinité hébraïque tribale dont l’origine historique est connue.
Le légendaire juif invalidé par l’archéologie
Huckabee proclame qu’il y a “4 000 ans” Yahvé aurait “choisi son peuple” et indique même la localisation de cet évènement : le mont Moriah, c’est-à-dire le mont Sion, à Jérusalem.
En -2000, l’archéologie a établi que Jérusalem était occupée par les Cananéens, un peuple que combattaient les Israélites. La “révélation” évoqué dans la Tanakh (“l’Ancien Testament”) a donc lieu en un endroit et à un moment où le “peuple” de Yahvé n’est pas présent.
Comme nous l’avons exposé dans notre article Être aryen (chapitre 14) : comprendre Yahvé, divinité hébraïque des juifs, des chrétiens et des musulmans, Yahvé était une divinité sémitique figurant au sein d’un panthéon de plusieurs divinités, dont sa compagne Ashurah. L’invention de ce dieu, attesté par les documents archéologiques, remonte à environ -1200 dans la région du Sinaï, très au Sud de l’actuelle ville de Jérusalem. La proclamation de Yahvé comme divinité “unique” intervient en -600 à l’initiative du roi juif Josias qui en fait la religion officielle.
Huckabee s’exprime ici en interprète littéraliste de la Tanakh, la bible hébraïque, faisant du légendaire rabbinique un fait pseudo historique dont découlerait la légitimité de l’entité sioniste, mais également celle de la politique extérieure américaine en faveur de cette entité. Ce n’est donc pas un simple exalté qui énonce des fables depuis longtemps invalidées, mais un ambassadeur en fonction qui formule l’adhésion de l’État américain à la mythologie hébraïque et à l’irrédentisme juif.
L’immoralité juive expliquée aux goyim
Les choses vont encore plus loin lorsque Huckabee s’exprime comme l’élève d’une yeshiva en proclamant que les goyim doivent leur accès à la “moralité” aux juifs qui l’auraient reçue directement de “Yahvé”.
Pour comprendre le sens de ce propos, il faut d’abord rappeler ce que proclament les rabbins : la moralité universelle consiste à être à l’image de Yahvé, finalité pour laquelle Yahvé a donné aux seuls juifs un ensemble de commandements à observer avec rigueur. Cela produit ce raisonnement circulaire de nature ethnocentrique : pour être juif il faut être juif.
Moïse, après avoir reçu les “tables de la loi” à l’origine théorique de la loi “morale” juive, échangeait régulièrement avec Yahvé. Ce dernier, très colérique, le guidait pour mettre en oeuvre ladite morale.
Deutéronome 20:16-17 : « Dans les villes de ces peuples que l’Éternel te donne en héritage, tu ne laisseras en vie rien de ce qui respire, car tu dévoueras à l’anathème les Hittites, les Amorites, les Cananéens […] comme l’Éternel, ton Dieu, te l’a ordonné ». Yahvé ordonne à Moïse d’exterminer complètement les habitants de certaines villes cananéennes lors de la conquête, sans épargner personne.
Nombres 15:32-36 : « L’Éternel dit à Moïse : Cet homme sera mis à mort ; toute l’assemblée le lapidera hors du camp ». Yahvé ordonne à Moïse de faire lapider un homme surpris en train de ramasser du bois le jour du Shabbat.
Nombres 16:31-35 : « L’Éternel parla à Moïse […] la terre s’ouvrit et les engloutit […] et un feu sortit de l’Éternel et consuma les deux cent cinquante hommes ».Yahvé ordonne à Moïse de laisser la terre engloutir Koré, Dathan, Abiram et leurs familles, et de consumer par le feu 250 rebelles offrant de l’encens non autorisé.
Lévitique 10:1-2 : « Les fils d’Aaron, Nadab et Abihu, prirent chacun leur encensoir […] et un feu sortit de devant l’Éternel et les consuma ». Yahvé ordonne implicitement à Moïse de laisser punir par un feu divin les prêtres (Nadab et Abihu) offrant un encens non autorisé.
Yahvé, soucieux des détails, se mêlait également d’agronomie, de confection, d’entomologie, de cuisine.
Lévitique 19:19 : « Tu ne porteras pas un vêtement tissé de deux espèces de fil »
Deutéronome 22:10 : « Tu ne laboureras pas avec un bœuf et un âne attelés ensemble »
Lévitique 11:20-21 : « Tout insecte ailé qui marche sur quatre pattes sera pour vous une abomination »
Lévitique 19:23-25 : « Quand vous planterez un arbre fruitier, vous considérerez ses fruits comme incirconcis […] la quatrième année, ils seront consacrés à l’Éternel »
Exode 12:15 : « Quiconque mangera du pain levé […] sera retranché d’Israël »
Yahvé ayant choisi les juifs, et seulement eux, pour être “moraux”, c’est-à-dire à son image, et ayant même créé l’univers en premier lieu pour y placer les juifs en son centre, il découle que les non-juifs ne peuvent pas, pour des raisons biologiques, être des hommes puisque cette moralité “universelle” juive se transmet exclusivement par le sang de la mère. Les goyim peuvent seulement s’en approcher en servant les juifs et leur trône, “Israël”, ainsi qu’en observant un certain nombre de restrictions comme le propose le noachisme.
D’où la formule passablement menaçante employée par Huckabee à l’adresse des goyim :
« Ceux qui bénissent Israël seront bénis, et ceux qui maudissent Israël seront maudits. »
Est-ce à dire que les non-juifs, et singulièrement les Européens, ignoraient la notion de moralité face à celle si engageante des juifs qui la tiennent pour “universelle” (mais inaccessible aux goyim) ?