Nous travaillons dans les usines pour produire les trucs que nous pourrons consommer. Nous le faisons contre rémunération pour pouvoir nous payer plus de trucs affin d'être plus épanouis pour pouvoir produire mieux plus de trucs. Nous consommons les loisirs produits par le capitalisme pour être plus heureux affin de mieux accepter de devoir produire plus de trucs et vouloir plus les consommer.
Nous sommes nos propres esclaves parce que nous acceptons de fait de nous maintenir sous la coupe du capitalisme international. Nous ne faisons que nous exploiter mutuellement.
Pis encore nous aimons nos chaînes, nous aimons cette illusoire sensation de liberté parce que - tout de même, tu comprends - on pourra quand même se payer le week-end à Disneyland et le dernier écran plat pour nous donner l’illusion de réfléchir devant Hanouna ou Canal+. Nous pourrons quand même nous la payer notre bouteille de mauvais whisky hors de prix au Macumba ce week-end. Nous aurons le sentiment d'être des princes, un moment nous aurons l'impression de ressentir ce vertige du vide, de toucher du doigt la grandeur.
Nous sommes misérables. Nous sommes des überbeaufs. Nous sommes des engrenages de viande dégueulasse. Nous aimons ça...
Heureusement il y a l'État pour veiller sur nous. Il encadre notre condition, la pare de grands idéaux. Habille toute cette immonde merde de drapeaux et de flonflons, nous ne déambulons plus dans ces villes que comme des fantômes. Des amas de viande glapissantes dans les rues de ce Disneyland sordides, satisfaits. Au mieux résignés... Mais on pourra toujours gueuler le jour convenu, à l'heure convenue, sur le tracé convenu entre la Place de la Bastille et la Porte de la République. Au moins nous avons encore le droit de lever (un peu) la voix, de serrer son poing en l'air en scandant tels des robots les poncifs idéologiques, prémâchés, prédigérés, prêts à consommer. Nous avons marchandisés les idées et elles ont été rachetées lors d'une OPA hostile par le capitalisme qui nous les revends ensuite chaque fois avec un nouvel emballage. Respect de la DLC : OK, mise en rayon idéologique, remplir son caddie... Bonjour, ça fera 99,99 balles avec la promotion, merci au revoir et à bientôt.
Tout n'est plus que spectacle. Tous n'est plus qu'émotions. Tout n'est plus que farce sordide.
Nous nous délectons de notre condition.